Witkin, sacrés clichés!
Je n'ai pas mis un pied dans l'exposition de Joel-Peter Witkin (BNF, site Richelieu) que j'entends déjà deux personnes s'écrier "C'est too much!" Mmm.. Je ne pense absolument pas que ce soit "too much" mais oui, il faut éviter d'amener son enfant de 6 ans voir ces photos, des dégâts psychotiques pourraient en résulter.
Photographe américain, Joel Peter Witkin retranscrit dans ses clichés les tourments de son âme et sa vision du corps humain. Perfectionniste, l'artiste dessine d'abord avant de prendre la photographie. Chaque modèle est minutieusement choisi, il faut en revanche qu'il ait un embonpoint, une jambe manquante, une petite taille, ou un visage original. Oui, le photographe est un original et aime ce qui l'est. Il ne le fait par contre pas exprès. Dès le plus jeune âge, son père l'introduit au grand Weegee - photographe américain se promenant sur des scènes de crime et offrant des clichés, dits trash -, il peut y avoir des séquelles. Ses influences, il les puise dans l'iconographie chrétienne, biblique et dans la mythologie. Il remet dans le contexte contemporain des oeuvres passées ou des mythes oubliés. Un manque de culture s'est fait sentir mais j'ai été malgré tout emportée dans son tourbillon de la mort. Il faut dire que l'exposition est bien amoncelée, parcours nous plongeant dans l'esprit - glauque et hyper esthétique - du photographe. Photographe pour qui le suicide est une solution envisageable et qui comprend mieux que quiconque la souffrance qui va parfois de paire avec l'existence.
D'un esthétisme rare, inspiré par les photographes Fred Holland Day et Julia Margaret Cameron, les photographies exposées nous révèlent la poésie avec laquelle Joel Peter Witkin entreprend de nous présenter sa vision, son imaginaire. Avec lui, la photographie devient sacrée.